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Education

Journal El Cabri's Journal: Réputation des universités.

Deux articles publiés récemment sont intéressants à mettre en rapport. L'un vient du New York Times, l'autre du Monde.

Le papier du Times concernait la tendance pour les facs américaines à changer leur nom et leur présentation pour se donner l'avantage dans la course aux inscriptions, ou tout du moins aux candidatures, gage de future réputation. L'exemple du Beaver College, rebaptisé Arcadia University, et qui a vu le nombre de candidatures doubler, était donné comme le plus significatif.

C'est compréhensible. Premièrement, college désigne généralement des établissements délivrant au maximum des diplômes de second cycle, et le terme university ceux allant jusqu'au troisième cycle, les graduate studies. Mais surtout, beaver signifie castor, et aussi pour les gens grossiers, désigne une partie de l'anatomie féminine que l'esprit vulgaire voudra associer à ce rongeur. C'était d'autant plus embarrassant que la petite, mais réputée institution privée était initialement réservée aux étudiantes.

Mis à part ce cas extrême, d'après le Times le nom et l'apparence du campus sont de plus en plus soignés pour venir en renfort du prestige académique, ou en remplacement de celui-ci quand il vient à manquer. C'est aussi une tradition pour les lycéens fraîchement acceptés dans plusieurs facs différentes, de participer à des visites guidées des campus au mois d'août avant de faire leur choix, même quand c'est à l'autre bout du pays. Pelouses impeccables et lierre accroché aux briques rouges des bâtiments néo-victoriens sont alors de rigueur, faute de quoi le boutonneux et sa tuition fee partent voir ailleurs. Ce serait amusant de voir les facs parisiennes basées à Jussieu faire visiter le campus, et ses chiottes à la turque au pied des tours, aux jeunes bacheliers. Peut-être une solution à la surpopulation des amphis.

L'article du monde relatait le dernier classement de la valeur scientifique des facs du monde établi par je-ne-sais-plus-quelle université chinoise. Le point intéressant du papier était le handicap des facs (et grandes écoles) françaises dû au chaos qui, justement entoure leur dénomination. Le seule nom d'université française qui viendra à l'esprit d'un néophyte étranger est la Sorbonne, ce qui pose problème puisque cette institution a disparu à la fin du XIXème siècle. À sa place, mai 68 aidant, la kyrielle de Paris I, 12, 9, je ne sais quoi. Trois ou quatre d'entre-elles rajoutent le nom Sorbonne à leur dénomination, et quatre ou cinq utilisent des locaux dans les bâtiments "historiques" du quartier latin. Pareil à Lyon, Grenoble, etc. L'article mentionnait également les dizaines d'appellations différentes pour le même établissement (Paris 6, Paris VI, Université P. & M. Curie ...). De mon côté j'ajouterais les micro-institutions que sont les grandes écoles, les "sous-institutions" inclues dans des universités mais communicant uniquement sur leur nom propre, voire partagées entre plusieurs autres institutions. À quoi il faut encore ajouter le Collège de France qui a des professeurs mais pas d'étudiants, les instituts de recherche genre C.N.R.S., INRIA, INRA, INSERM, qui ont des chercheurs mais pas d'enseignement, mais qui ont des unités de recherche associées avec les facs. À quoi il faut encore ajouter les unités délocalisées, comme quoi à l'École des Mines "de Paris" on peut faire ses études sur la Côte d'Azur. Et les diplômes co-organisés, comme mon DEA qui était co-organisé par Paris 6 (VI ?), Paris 7, l'X, les ENS de Paris et de Lyon (Cachan ? me souviens plus), avec des profs venant de chacun de ces établissements et des cours donnés parfois à Jussieu, parfois rue d'Ulm.

C'est plus qu'illisible, c'est ridicule. Vouloir y remédier n'est pas remettre en cause la qualité scientifique de la recherche publique : les scientifiques français coopèrent beaucoup dans le monde entier et produisent d'excellent résultats. Les C.N.R.S., C.E.A., INRIA et consorts se font évaluer par des comités indépendants formés de chercheurs étrangers. Le problème est qu'il n'y a aucune "marque" pour porter ce prestige mérité. J'ai vu des gens ici à Intel Labs coopérer étroitement, baser compètement leurs travaux sur des résultats de labos français sans être capables de dire à quelle institution leurs interlocuteurs appartenait.

C'est un problème qui peut se régler par l'impression de papier à en-tête. Mais c'est quand même plus compliqué que de transformer le Beaver College en Arcadia University.

He has not acquired a fortune; the fortune has acquired him. -- Bion

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